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Extrait



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Point de Vue


La Haute Couture au rang de l’Art. Christian Dior, la
nature pour seule muse.
Christian Dior, 2 ème d’une fratrie de 3 garçons et 2 fi lles, naît dans
la station balnéaire de Granville le 21 janvier 1905. Leurs parents,
Madeleine et Maurice Dior, appartiennent à une bourgeoisie granvillaise
et côtoient au quotidien des personnalités célèbres de l’époque.
Maurice possède une industrie très prospère et devient le plus célèbre
de la famille Dior. Nous citerons Lucien Dior, Ministre du Commerce en
1921, puis Ministre du Commerce et de l’Industrie de 1922 à 1924. Au Gérard Dorey, Président
terme de ces mandats, il a choisi de s’associer avec son cousin Maurice
pour développer dans leur usine de Donville la fabrication d’engrais phosphates et super phosphates,
de l’acide sulfurique et tous les produits chimiques de l’époque. Les émanations de ces fumées vont
incommoder tout particulièrement les habitants des environs.
© Dior Horlogerie Saint-Marc. Au cours de ces années, Madeleine Dior engage la restauration de la villa des Rhumbs.
Dans les années 20, il développe la fabrication de lessive et crée la javel Dior et la fameuse lessive
En parallèle, elle réhabilite le parc de la propriété avec des travaux d’horticulture en compagnie de
ses enfants et, particulièrement, du futur couturier qui partage une passion pour les fl eurs, au point
que Christian Dior gardera ce souvenir d’enfance et s’en émerveillera pour toujours. Ceci ira jusqu’à
infl uencer ses créations très marquées par l’élégance maternelle très raffi née, ses tenues représentant
le style Belle Epoque réalisées pour le théâtre. Fort de cette passion, le couturier décide de s’installer
à Paris en 1947 à l’âge de 42 ans, avec la volonté de créer sa griffe : « je dessinais des femmes-fl eurs,
épaules douces, bustes épanouis, tailles fi nes et jupes larges ».
Sa première collection s’est déroulée le 12 février 1947 au siège social parisien de la Maison de Couture,
30 avenue Montaigne. Ce jour-là comme les saisons suivantes, le couturier révolutionne littéralement
Bracelet en veau verni noir, mouve- la mode et la silhouette féminine en prônant un retour en arrière. « La couture souhaitée est de revenir
ment automatique, série limitée à
88 exemplaires. 46 500 euros. à sa fonction première qui est de parer les femmes et les embellir », écrit-il. Pour autant comprendre
l’engouement que suscite alors ces lignes doit être placé dans un contexte social : on est au lendemain
de la seconde guerre mondiale, une période de restriction et de grèves. « En terme d’allure, les femmes
arborent encore des profi ls de « zazous » et chaussures compensées, effets de bas, de jupes courtes à
Christian Dior nous dévoile
en exclusivité sa dernière l’image d’une mode de tristesse et de pénurie ». Futilité et superfl u que Christian Dior n’hésite pas à
création, la Dior VIII Grand mettre en avant. Ses modèles sont généreux et exigent des longueurs vertigineuses de tissus, les jupes
Bal « Fil de Soie ». rallongent, les broderies s’enlacent, les fl eurs partout s’épanouissent. Provocation et scandale pour
Lorsqu’on agite le boîtier en les uns, miracle d’un décor qui renoue avec le plaisir et le sourire pour les autres. Toutes les femmes
céramique noire, or rose et dia- du monde sont sous le charme de ce retour à l’art de vivre. Pour la première fois dans l’histoire,
mants, le spectacle commence. un couturier infl uence de manière simultanée l’élite et le grand public. Lui-même en paraît surpris,
La masse oscillante tendue de fi l mais théorise ainsi son succès. « Lorsque devenu responsable d’un mouvement, j’ai voulu l’analyser et
de soie et ourlée de diamants se
met comme par magie à tour- compris qu’il incarnait avant tout le retour à l’art de plaire. » Il n’hésite pas en 1954 à démontrer sa
noyer sur le cadran en nacre, propre mode avec la ligne haricot, baptisée aussi « fl at look », silhouette à la fois longiligne, adaptée
tels les jupons des somptueuses au changement de mœurs.
robes de bal que Monsieur Dior
aimait tant. En 1957, le Time offre sa « Une » à Christian Dior et son incroyable succès. Jamais auparavant un
couturier n’a occupé une telle place dans la presse américaine. Son premier séjour américain en 1947 a
Soulignons le travail qui se dissi-
mule derrière cet effet de style, bouleversé sa conception de la mode. Il fut invité par le directeur du Grand Magasin de Dallas afi n de
celui d’une tisseuse capable de recevoir un Oscar de la couture, il débarque dans un pays où sa seule et première collection l’a rendu
tendre son fi l d’un diamant à un célèbre.
autre sans le casser. Christian
Dior disait « La soie est la reine Les Arts Décoratifs mettent le XVIII ème siècle à l’honneur du 13 février au 8 juin 2014
des matières, la plus ravissante,
la plus féminine, la plus enchan- en présentant une grande exposition sur le secret de la laque française.
teresse… ». Bel hommage.
Le musée révèle l’engagement dans la technique qui incarne le luxe et le raffi nement du plus
important au plus discret, du plus somptueux au plus modeste : meubles, panneaux, boiseries, objets
d’ameublements, boîtes et étuis, carrosses et traîneaux dessinent l’histoire largement partagée par une
clientèle parisienne et européenne. Cette exposition est réalisée en collaboration avec le Lackkunst
Museum de Münster en Allemagne.

Quelques décennies seulement après l’arrivée des premiers laques chinois et japonais en Europe, les
artisans dont le nom est parvenu jusqu’à nous, ont ouvert des ateliers spécialisés dans la fabrication
d’objets laqués en utilisant le vernis Martin. Etant donné la nouveauté de la technique, des vernisseurs
pionniers méfi ants s’installeront principalement dans le Faubourg Saint Antoine comme l’avaient fait
les premiers ébénistes. Le Faubourg jouissait du privilège de l’exemption du contrôle des corporations,
peu favorable aux innovations. Que faut-il penser des secrets des Martin ? Peut-on considérer qu’il y
avait un véritable secret ? Peu importe la recette, la différence de leur ouvrage réside dans un savoir-
faire d’exception.


« Je ne pense jamais au futur, il vient bien assez tôt » Albert Einstein (1879-1955)

Invention Magazine - janvier/février 2014 3
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